Recommandations sur l’utilisation de produits sanguins irradiés au Canada

Summary

Un projet de collaboration entre le CCN et le CCNMT

Credits
Membres du sous-comité CCN-CCNMT sur l’irradiation
Oksana Prokopchuk-Gauk, M.D.; coprésidente (CCN)
Nancy Robitaille, M.D.; coprésidente (CCNMT)
Alan Tinmouth, M.Sc., M.D.
Andrew Shih, M.D.
Charles Musuka, M.D.
Dana Devine, PhD.
Douglas Morrison, M.D.
Vincent Laroche, M.D.
Président du CCN
Andrew Shih, M.D.
Président du CCNMT
Vincent Laroche, M.D.
Représentante du ministère provincial
Katherine Logan (Colombie-Britannique)
Coordonnatrice du CCN
Kendra Stuart
Date of Original Release
Date of Last Revision:
Publication Date

List of abbreviations

ASPC

Agence de la santé publique du Canada

HLA

Antigène leucocytaire humain

CSA

Association canadienne de normalisation

BJH

British Journal of Haematology

BSH

British Society for Haematology

CCNMT

Comité consultatif national en médecine transfusionnelle

CCN

Comité consultatif national sur le sang et les produits sanguins

CAR-T

Lymphocytes T à récepteur antigénique chimérique

GvH

Maladie du greffon contre l’hôte

SHOT

Programme Serious Hazards of Transfusion

SCMT

Société canadienne de médecine transfusionnelle

SSET

Système de surveillance des erreurs transfusionnelles

SSIT

Système de surveillance des incidents transfusionnels

Summary of Revisions

Revision Date

Details

2023-10-26 Irradiation Recommendations - 2018 Revisions_FR.png
2023-10-26 Irradiation Recommendations - 2018 Revisions_FR.png
2023-10-26 Irradiation Recommendations - 2023 Revisions_FR.png
2023-10-26 Irradiation Recommendations - 2023 Revisions_FR.png
Contexte

Le Comité consultatif national sur le sang et les produits sanguins (CCN) est un organisme consultatif médical et technique interprovincial auprès des ministères de la Santé des provinces et des territoires et de la Société canadienne du sang. Le mandat du CCN est disponible en ligne à nacblood.ca.

En 2014, le comité de liaison provincial et territorial de la Société canadienne du sang a demandé au CCN d’élaborer des recommandations et des lignes directrices sur l’utilisation des produits sanguins irradiés pour les patients canadiens. Le comité de liaison provincial et territorial de la Société canadienne du sang facilite le travail entre les gouvernements des provinces et des territoires (à l’exception du Québec) et la Société canadienne du sang. L’objectif est de garantir un système d’approvisionnement en sang sûr, sécuritaire et abordable ainsi que des produits et services de la Société canadienne du sang approuvés par les ministères de la Santé des provinces et des territoires, qui sont membres de la Société canadienne du sang.

Le CCN a mis sur pied un groupe de travail sur l’irradiation pour qu’il examine les normes actuelles, les lignes directrices publiées et la littérature récente sur les indications de produits irradiés et sur la qualité des culots globulaires irradiés afin de faciliter les recommandations de pratiques exemplaires. Ce groupe a travaillé en collaboration avec des représentants du Comité consultatif national de médecine transfusionnelle (CCNMT) du Québec, qui s’est joint au processus d’élaboration des recommandations, formant ainsi le groupe de travail conjoint CCN-CCNMT sur l’irradiation. Ce processus d’élaboration de recommandations s’est également fait en consultation avec des experts canadiens de la médecine transfusionnelle. En outre, le groupe a sollicité les commentaires d’un certain nombre d’organisations axées sur la pratique clinique avant de finaliser ses recommandations.

Le premier document ainsi produit a été publié en 2017; il était guidé par les lignes directrices sur l’utilisation des produits sanguins irradiés publiées par le British Committee for Standards in Haematology 2010 et par les lignes directrices sur la prévention de la maladie du greffon contre l’hôte associée à la transfusion (GvH transfusionnelle) publiées par l’Australian and New Zealand Society of Blood Transfusion , 2011. D’autres normes sur la pratique de la médecine transfusionnelle ont été consultées, notamment la norme Z902-15 (2015) de l’Association canadienne de normalisation (CSA), les normes de la Société canadienne de médecine transfusionnelle (SCMT) (version 4, 2017), les normes du Conseil de l’Europe (version 17, 2013), de même que des publications récentes sur la qualité des culots globulaires entreposés après l’irradiation et sur les pratiques concernant l’irradiation de sang autologue prélevé au moyen de la méthode de récupération peropératoire.

Les recommandations du CCN-CCNMT sur l’utilisation des produits sanguins irradiés au Canada ont été révisées en 2021. Le sous-comité sur l’irradiation (soit l’ancien groupe de travail), constitué du CCN et du CCNMT, s’est de nouveau réuni pour terminer ces travaux. Les recommandations formulées dans le présent document sont guidées par les dernières lignes directrices sur l’utilisation des produits sanguins irradiés de la British Society for Haematology (BSH, 2020) et les lignes directrices hollandaises sur la prévention de la GvH transfusionnelle publiées dans le British Journal of Haematology (BJH, 2021); les normes de pratique publiées sur la médecine transfusionnelle, dont les normes Z902-20 (2020) de la CSA et les normes de la SCMT (version 5, 2021); et une revue de la littérature portant sur la recherche des cas déclarés de GvH transfusionnelle publiée entre le 1er janvier 2017 et le 31 janvier 2022, de même que des données récentes sur la qualité des culots globulaires entreposés après une irradiation. Le supplément inclut un sommaire de la revue de la documentation.

Pourquoi utiliser du sang irradié

L’irradiation des produits cellulaires est une pratique bien établie pour prévenir la maladie ou la réaction du greffon contre l’hôte associée à la transfusion (GvH transfusionnelle). Fournir des produits sanguins irradiés comporte toutefois des coûts : les coûts de production sont plus élevés et il y a des coûts liés à la conformité réglementaire et à la logistique de l’approvisionnement. L’irradiation a un effet négatif sur la qualité des culots globulaires; elle endommage notamment les membranes, ce qui entraîne un raccourcissement de la durée de vie des cellules ainsi que des pertes de potassium. Cela vient souligner l’importance de prendre en compte l’âge des culots globulaires au moment de l’irradiation et la durée de l’entreposage après l’irradiation (Serrano et al., 2014). Le sous-comité sur l’irradiation a donc mis l’accent sur la nécessité de limiter l’utilisation des culots globulaires irradiés aux patients qui ont des indications cliniques précises pour ces produits. Une telle gestion des réserves des hôpitaux réduirait au minimum l’exposition de la patientèle générale aux culots globulaires irradiés.

Les données fournies par nos fournisseurs de sang nationaux témoignent de certaines tendances dans les pratiques d’irradiation au Canada au cours des 15 dernières années. Le pourcentage de culots globulaires irradiés à l’échelle nationale est passé de 4,5 % (2004-2005) à 6,7 % (2015-2016), puis a connu un légère baisse, à 5,9 % (2021-2022). Il continue à exister un écart considérable entre les régions. Selon la province, le pourcentage des unités de globules rouges irradiées distribuées par la Société canadienne du sang varie entre 1 % et 20 %. Les unités irradiées distribuées par Héma-Québec en 2021-2022 représentaient 5,6 %. Les écarts provinciaux de demande en culots globulaires irradiés peuvent notamment être dus à l’éloignement des hôpitaux par rapport au site de distribution du sang et à la présence ou non d’un irradiateur sur place, ainsi qu’aux différences de pratique transfusionnelle selon les régions.

La GvH transfusionnelle est une complication rare et souvent mortelle. Elle est provoquée par la prise de greffe des lymphocytes immunocompétents du sang du donneur, qui sont perçus comme des corps étrangers et qui endommagent les tissus du receveur. Les personnes les plus à risque sont les receveurs fortement immunosupprimés et ceux dont l’organisme ne reconnaît pas les lymphocytes transfusés du donneur comme des corps étrangers lorsque les allèles HLA (antigène leucocytaire humain) sont haplo-identiques.

La détermination des groupes de patients immunosupprimés auxquels il est recommandé d’administrer du sang irradié s’appuie largement sur des observations, des études de cas, des analyses et des suppositions sur le degré d’immunosuppression. Il y a par conséquent un manque de cohérence dans les livres de cours, les publications et les lignes directrices concernant les catégories de patients qui doivent recevoir du sang irradié. De nombreux auteurs remédient à ce manque de clarté en ajoutant une catégorie d’indications pour lesquelles la nécessité de transfuser du sang irradié est incertaine.

À la lumière des signes de plus en plus nombreux témoignant de la piètre qualité des culots globulaires entreposés après l’irradiation, il est nécessaire de déterminer avec prudence les indications cliniques justifiant la transfusion de sang irradié afin d’éviter de tenir trop de stocks de culots globulaires irradiés. Sans irradiateur sur place, il peut s’avérer difficile de trouver la bonne quantité de produits à conserver en stock pour les patients ayant besoin de sang irradié, sans tomber dans l’excès. La qualité et l’entreposage des plaquettes et des concentrés de granulocytes post-irradiation ne suscitent pas ce genre de préoccupations étant donné la brève durée de conservation de ces produits.

En plus de l’utilisation de l’irradiation comme stratégie d’atténuation de la GvH transfusionnelle, selon de récentes observations et les derniers résultats de recherche, la déleucocytation des produits avant l’entreposage et le temps écoulé depuis le don pourraient aussi avoir une incidence sur le risque de GvH transfusionnelle. Toutefois, rien ne prouve à ce jour que la réduction leucocytaire avant l’entreposage et l’utilisation de culots globulaires plus âgés sont aussi efficaces que l’irradiation.

Dans une revue systématique de cas déclarés de GvH transfusionnelle, les auteurs indiquent que dans plus de 94 % des cas, le sang était âgé de moins de 10 jours. Aucun cas n’était associé à des produits de plus de 14 jours (Kopolovic et al., 2015). Un examen de 290 cas signalés à la Croix-Rouge japonaise de 1992 à 1999 a mis en évidence 66 cas, confirmés par l’analyse des microsatellites de l’ADN. Dans cet ensemble de cas, le sang transfusé le plus âgé avait 10 jours pour le sang total, 11 jours pour les culots globulaires sans solution additive et 14 jours pour les culots globulaires contenant une solution de mannitol, d’adénine et de phosphate (Uchida et al., 2013). Un autre rapport de la Croix-Rouge japonaise indique que dans 96 % des 51 cas examinés, le sang administré était âgé de moins de 96 heures (Jawa et al., 2015). Ces observations semblent montrer qu’on pourrait envisager d’atténuer les risques en transfusant du sang entreposé pendant plus de 14 jours.

Il convient de souligner qu’après les attentats terroristes de New York, en 2001, le Royaume-Uni a décidé d’accroître ses réserves de sang. Par conséquent, l’âge moyen des unités de sang distribuées aux hôpitaux après 2002 est passé de 8 jours à entre 12 et 14 jours, ce qui peut avoir contribué à réduire le risque de GvH transfusionnelle (Williamson et al., 2007).

Toutefois, une étude en laboratoire récemment publiée évaluant la viabilité et la capacité proliférative des leucocytes (globules blancs) résiduels dans les unités de culots globulaires déleucocytés porte à penser qu’une durée d’entreposage plus longue pourrait être nécessaire. La filtration des unités faisait passer le nombre de leucocytes, en particulier les lymphocytes T, à 0,001 % de cellules par unité (± 0,003 %); toutefois, l’activité proliférative de ces leucocytes résiduels restait similaire à celle des leucocytes avant la filtration. Après l’entreposage des culots globulaires, des cellules viables pouvaient être détectées à 14 jours et jusqu’à 21 jours d’entreposage, bien que leur activité proliférative soit en nette diminution au jour 21, à 0,24 % (± 0,41 %). Les auteurs ont conclu qu’au bout de 21 jours, les lymphocytes T étaient suffisamment inactifs, ce qui pourrait aider à prévenir la GvH transfusionnelle lorsque les culots globulaires irradiés ne sont pas disponibles (Mykhailova et al., 2021).

La possibilité d’atténuer le risque par réduction leucocytaire avant l’entreposage s’appuie, outre sur cette étude, sur des données recueillies par le programme d’hémovigilance Serious Hazards of Transfusion (SHOT) du Royaume-Uni. Au total, 14 cas de GvH transfusionnelle ont été signalés au SHOT depuis 1996. De ce nombre, seulement 3 sont survenus depuis l’introduction de la déleucocytation universelle en 1999. Dans 2 de ces cas, les patients avaient reçu des produits déleucocytés. Le premier cas, signalé en 1999, était un patient atteint d’un myélome multiple. Le second cas, survenu en 2001, était un patient de 14 ans en rechute de leucémie aiguë lymphoblastique. Les personnes qui avaient donné le sang potentiellement impliqué n’ont pas été rappelées pour un typage HLA. Rapporté en 2012, le cas le plus récent s’est produit à la suite d’une transfusion intra-utérine d’urgence de sang maternel non déleucocyté, non irradié. On a découvert par la suite que la mère avait un haplotype HLA homozygote (Bolton-Maggs, 2012). Aucun autre cas de GvH transfusionnelle n’a été signalé au programme SHOT depuis 2012 (Rapports annuels et synthèses du SHOT au Royaume-Uni).

Une recherche menée dans le cadre du programme Canada Vigilance de Santé Canada entre le 1er octobre 2015 (date de publication du Règlement sur le sang) et le 28 février 2022 a repéré 1 cas de réaction indésirable grave dont le codage incluait la GvH; un examen détaillé a toutefois confirmé que la GvH transfusionnelle n’était pas concernée. L’interrogation de la base de données du Système de surveillance des incidents transfusionnels (SSIT) de l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC) entre 2010 et 2020 n’a révélé aucun cas déclaré de GvH transfusionnelle « certainement », « probablement » ou « possiblement » associée à la transfusion. Depuis 2020, plus de 95 % des hôpitaux canadiens fournissant des services de transfusion contribuent aux données du SSIT. Depuis 2010, aucun cas de GvH transfusionnelle n’a été déclaré dans le système d’hémovigilance du Québec.

Il est important de repérer les erreurs transfusionnelles pour compléter le suivi des réactions indésirables liées à la transfusion. Le Règlement sur le sang de Santé Canada exige des établissements de transfusion qu’ils tiennent un journal des erreurs aux fins d’assurance de la qualité; toutefois, il ne précise pas le mécanisme ou la base de données à adopter. Le Système de surveillance des erreurs transfusionnelles (SSET) de l’ASPC a été lancé en 2005 pour surveiller les erreurs survenant à tout moment le long de la chaîne transfusionnelle. Les erreurs saisies dans le SSET peuvent être suivies au moyen de catégories et de codes prédéfinis. L’un de ces codes, « DP 03 – Exigences particulières non indiquées/incorrectes (ex. autologue, irradiation) », peut être utilisé pour justifier la transfusion d’un produit non irradié à un individu présentant des conditions acceptables pour un produit irradié. Malheureusement, l’utilisation volontaire de la base de données du SSET n’est pas suffisante, moins de 20 % de tous les établissements de transfusion au pays participant officiellement à ce programme. Par ailleurs, cette catégorie peut inclure des erreurs correspondant à d’autres exigences particulières de transfusion non saisies. Par conséquent, on ne connaît pas les taux actuels d’erreurs transfusionnelles en lien avec l’administration d’unités non irradiées à des patients présentant une indication existante pour des produits irradiés.

Les technologies d’inactivation des agents pathogènes pour les plaquettes mélangées ou d’aphérèse seront activement mises en oeuvre par les sites de production de la Société canadienne du sang au cours des années à venir. En janvier 2022, la Société canadienne du sang a commencé à fournir des plaquettes traitées au psoralène utilisant la technologie de réduction des agents pathogènes INTERCEPT® DS de Cerus. Selon la notice d’INTERCEPT®, les plaquettes fabriquées au moyen de ce processus n’ont pas besoin d’être irradiées puisque la technologie d’inactivation des agents pathogènes neutralise également les lymphocytes T résiduels du donneur. L’utilisation généralisée de cette technologie d’inactivation des agents pathogènes pour la transfusion de plaquettes en Europe n’a pas entraîné d’augmentation des cas de GvH transfusionnelle à ce jour (Cid et al., 2017).

Plusieurs systèmes d’inactivation des agents pathogènes existent présentement dans le monde, mais tous ne sont pas approuvés par Santé Canada. Face à l’introduction de ces systèmes au Canada, il sera nécessaire de procéder à un examen minutieux des recommandations des fabricants pour vérifier si de telles technologies offrent une protection contre la GvH transfusionnelle ou si les produits doivent être irradiés pour atténuer ce risque. Certaines données laissent même penser que la technologie d’inactivation des agents pathogènes pourrait être tout aussi, voire plus efficace que l’irradiation aux rayons gamma pour atténuer le risque de GvH transfusionnelle et qu’il conviendrait de l’appliquer universellement (Cid et al., 2017). Des recherches cliniques sur la technologie d’inactivation des agents pathogènes sont en cours et ces données continuent à évoluer.

Objet du document et guide

Après un examen des meilleures données disponibles, le sous-comité CCN-CCNMT sur l’irradiation a actualisé ses premières recommandations, d’une part pour aider les médecins cliniciens canadiens à déterminer quels patients auraient besoin de composants sanguins irradiés et, d’autre part, pour définir l’âge requis des composants au moment de l’irradiation et leur durée de conservation une fois qu’ils sont irradiés. On part du principe que les laboratoires qui irradient des composants sanguins le font selon les normes et les règlements canadiens publiés sur la médecine transfusionnelle.

À titre d’information pour le lectorat, nous avons ajouté une note après chaque recommandation pour en indiquer la référence :

  • Un astérisque (*) indique un passage traduit directement de la source citée en référence.
    • Une indication du niveau de preuve associé à la recommandation peut également être fournie si elle figure dans les lignes directrices originales.
  • Les énoncés de recommandations sans mention de référence sont considérés par le CCN-CCNMT et le sous-comité sur l’irradiation comme des énoncés de bonne pratique, d’après les lignes directrices publiées ou la littérature consultée.

Les recommandations se rapportant à l’âge des culots globulaires et à la durée de conservation post-irradiation respectent les normes Z902-20 (2020) de la CSA et les normes de la SCMT (version 5, 2021).

Les critères du sous-comité pour déterminer les patients auxquels il conviendrait d’administrer des produits cellulaires irradiés sont en accord avec la majorité des lignes directrices de la BSH publiées en 2020 au Royaume-Uni et celles du BJH publiées en 2011 aux Pays-Bas. Les différences entre ces deux ensembles de lignes directrices fondées sur les preuves sont résumées dans un article publié qui souligne l’utilisation de ces mêmes données pour arriver à différentes conclusions (Bolton-Maggs, 2021).

Sauf mention contraire, on peut supposer que les recommandations proposées dans le présent document s’appliquent aussi bien à la population adulte qu’à la population pédiatrique.

 

Recommandations Générales

Le sous-comité CCN-CCNMT sur l’irradiation souscrit aux recommandations générales suivantes en ce qui concerne le type de produit sanguin à irradier, la mise en commun des informations et la communication des besoins d’un patient en matière de produits sanguins irradiés, ainsi que l’hémovigilance.

1. Produits sanguins qu’il est recommandé d’irradier

  1. Recommandation : Pour les patients à risque, il est recommandé d’irradier tous les concentrés de globules rouges, de plaquettes et de granulocytes, sauf les globules rouges cryoconservés après déglycérolisation. Il n’est pas nécessaire d’irradier le plasma frais congelé, le cryoprécipité ni les produits de fractionnement du plasma.
    (BSH 2020, recommandation de classe 1; niveau de preuve B)*
  2. Recommandation : Tout le sang transfusé provenant d’un parent de premier ou de deuxième degré doit être irradié, même si le patient est immunocompétent.
  3. Recommandation : Toutes les unités de plaquettes sélectionnées par typage HLA (épreuve de compatibilité) doivent être irradiées, même si le patient est immunocompétent.
  4. Recommandation : Tous les concentrés de granulocytes doivent être irradiés avant administration.
  5. Recommandation : Il est déconseillé d’irradier les produits cellulaires à agents pathogènes inactivés traités au psoralène et aux rayons UVA.

Reportez-vous au point 6.C ci-dessous pour la gestion des stocks en cas de transfusion d’urgence lorsque les produits sanguins irradiés ne sont pas disponibles.

2. Âge des produits sanguins cellulaires et délais d’entreposage post-irradiation

Des données récentes ont montré que l’âge des culots globulaires au moment de l’irradiation est important. Après avoir analysé plus de 900 unités de culots globulaires à différentes étapes combinées d’entreposage et d’irradiation, la Société canadienne du sang a montré que les culots globulaires irradiés tardivement durant la période d’entreposage ou conservés pendant de longues périodes présentent des taux d’hémolyse et de potassium plus élevés que les culots globulaires non irradiés, et sont associés à une moindre récupération après la transfusion (Serrano et al., 2014). Ces conclusions ne sont pas sans conséquences pour la sécurité des patients ainsi que pour les pratiques de gestion des stocks des hôpitaux.

La dernière révision des normes Z902-20 de la CSA en 2020 sur l’entreposage des culots globulaires irradiés recommande des délais plus stricts. Les normes de la SCMT (version 5, 2021) s’alignent sur les normes actuelles de la CSA. Pour permettre aux hôpitaux d’entreposer les culots globulaires pendant un maximum de 14 jours, la Société canadienne du sang et Héma-Québec ont établi une pratique interne pour irradier les culots globulaires dans les 14 jours suivant leur prélèvement. Les dates d’expiration figurant sur les culots globulaires sont en conformité avec les normes 2020 de la CSA.

En général, on prête peu d’attention à l’irradiation des plaquettes ou des granulocytes. L’irradiation augmente la vésiculation des plaquettes et peut raccourcir leur survie in vivo, mais on ne sait pas avec certitude si ces actions sont significatives chez les receveurs de plaquettes transfusées. Les technologies d’inactivation des agents pathogènes font principalement appel à l’irradiation par ultraviolets, mais il a été montré que ce processus endommage les plaquettes, qui restent dans le sang pendant moins de temps et sont davantage activées que les plaquettes non traitées au moment de l’injection (McCullough et al., 2004; Pineda et al., 2006; Snyder et al., 2005; van Rhenen et al., 2003; van Rhenen et al., 2004). Cela peut risquer d’augmenter la fréquence des transfusions chez certains patients (Garban et al., 2018).

  1. Recommandation : Les composants de globules rouges peuvent être irradiés jusqu’à 28 jours après leur prélèvement. Les globules rouges irradiés doivent être transfusés dès que possible, au plus tard 14 jours après l’irradiation et, dans tous les cas, au plus tard 28 jours après le prélèvement.
    (Association canadienne de normalisation, Z902-20, 2020)*
  2. Recommandation : Les plaquettes peuvent être irradiées à n’importe quel moment de leur entreposage et, par la suite, être conservées jusqu’à leur date de péremption habituelle suivant le prélèvement.
    (BSH 2020, recommandation de classe 1; niveau de preuve A)*

3. Explication de la situation aux patients

  1. Recommandation : Il est conseillé d’informer les patients à risque de GvH transfusionnelle qu’ils ont besoin de produits sanguins irradiés. Il incombe au professionnel de la santé principal de les en informer au moment où est posée l’indication de transfusion de sang irradié.

4. Communication

  1. Recommandation : Lorsqu’un patient a une indication justifiant une transfusion de sang irradié, il incombe au professionnel de la santé principal de communiquer cette indication au laboratoire de médecine transfusionnelle.
  2. Recommandation : Pour assurer l’uniformité des soins aux patients d’une juridiction à l’autre, en particulier entre les établissements hospitaliers participant au modèle de soins partagés, il y aurait lieu d’instaurer, à titre de pratique exemplaire, un processus de communication entre les cliniciens et le laboratoire de médecine transfusionnelle pour faciliter la communication des renseignements sur les besoins transfusionnels de chaque patient. Dans un monde idéal, il y aurait un système de notification électronique qui permettrait de voir automatiquement la liste des médicaments que le patient a pris ainsi qu’une note indiquant au laboratoire de médecine transfusionnelle que le patient a besoin de sang irradié.

5. Hémovigilance

  1. Recommandation : Il est recommandé que le service de médecine transfusionnelle tienne des données d’hémovigilance sur les patients qui présentent des indications de transfusion de produits sanguins irradiés, mais qui ont reçu des produits sanguins cellulaires non irradiés (ou considérés non irradiés, à savoir réduits en agents pathogènes ou conservés pendant au moins 14 jours et transfusés dans un contexte d’urgence). Lors de la survenue de ce type d’erreur, il est conseillé d’enregistrer les documents circonstanciels dans le dossier de santé du patient et dans les systèmes d’information sur la sécurité de l’autorité compétente.
  2. Recommandation : Lorsqu’on apprend qu’un patient ayant des indications de transfusion de produits sanguins cellulaires irradiés a reçu une transfusion de produits sanguins non irradiés de façon non intentionnelle ou par nécessité (saignement mettant sa vie en danger), il est recommandé que le médecin transfusionnel et le professionnel de la santé principal évaluent le risque de GvH transfusionnelle au moment de la découverte de l’incident. S’ils déterminent un risque important de GvH transfusionnelle, le médecin ayant demandé la transfusion de sang devra communiquer l’incident au patient et s’assurer d’une surveillance clinique des signes de GvH transfusionnelle pendant les 6 semaines suivantes.

Une enquête est recommandée lorsqu’un patient développe, 1 à 6 semaines après la transfusion, un syndrome clinique de GvH transfusionnelle caractérisé par une constellation de signes et de symptômes (éruption érythémateuse maculo-papuleuse, fièvre, hépatosplénomégalie, trouble hépatique, pancytopénie, aplasie médullaire, entre autres). Il est conseillé que l’enquête inclue une biopsie tissulaire (peau ou foie) et des études du chimérisme moléculaire sur le sang périphérique ou les tissus. L’absence de preuve n’exclut pas le diagnostic de chimérisme; elle est toutefois importante pour évaluer l’imputabilité. Les définitions du système d’hémovigilance canadien incluent celles du Manuel de l’utilisateur du SSIT de l’Agence de la santé publique du Canada ou du Guide de déclaration des événements indésirables associés à la transfusion de produits sanguins du système d’hémovigilance du Québec de l’INSPQ. Étant donné que les définitions de la GvH transfusionnelle dans les ressources canadiennes n’incluent pas de catégories d’imputabilité de la transfusion, il peut être utile de consulter le National Health And Safety Network Biovigilance Component Hemovigilance Module Surveillance Protocol des États-Unis.

  1. Recommandation : Tous les cas suspectés ou confirmés de GvH transfusionnelle doivent être signalés au fournisseur de sang dès que possible, en particulier avant le terme de l’enquête.

Si le produit sanguin mis en cause provient du fournisseur de sang, le cas doit être signalé au fournisseur de sang, qui doit ensuite soumettre un rapport dans le cadre du programme Canada Vigilance de Santé Canada. Si le produit sanguin a été manipulé par un établissement hospitalier, ce dernier doit directement soumettre un rapport dans le cadre du programme Canada Vigilance de Santé Canada.

Recommandations relatives à la gestion des stocks

Comme indiqué précédemment, l’entreposage prolongé d’unités pré-irradiées est associé à d’importantes concentrations de potassium, à des hémolyses in vitro et à une moindre récupération après la transfusion (Serrano et al., 2014). Le fait de tenir d’importants stocks de culots globulaires irradiés peut conduire à la transfusion potentiellement dangereuse de ces produits à des patients pour lesquels l’irradiation n’est pas nécessaire.

Une gestion proactive des stocks doit prendre en considération le risque perçu de GvH transfusionnelle chez la patientèle locale, le risque de transfuser des culots globulaires irradiés à des patients qui n’ont pas besoin de produits irradiés et la logistique entourant la distribution de produits irradiés en vue de transfusions programmées. Il est donc recommandé que l’irradiation des culots globulaires ait lieu au moment le plus rapproché possible de la transfusion.

6. Disponibilité des produits sanguins irradiés

  1. Recommandation : Pour les transfusions programmées, il est recommandé de pouvoir faire appel à un pôle régional chargé d’irradier les produits sur demande ou de conserver des stocks limités de produits déjà irradiés.
  2. Recommandation : Il n’est pas recommandé d’avoir un stock excédentaire d’unités pré-irradiées pour les transfusions d’urgence. S’il est absolument nécessaire d’entreposer un stock de produits pré-irradiés, il est recommandé d’avoir des culots globulaires qui ont été irradiés dans les 14 jours suivant le prélèvement, si possible.

Comme mentionné plus haut, des données d’observation du programme d’hémovigilance SHOT du Royaume-Uni (Williamson et al., 2007), une revue systématique de 348 cas de GvH transfusionnelle (Kopolovic et al., 2015) et trois revues de données de la Croix-Rouge japonaise montrent que les risques sont atténués par la déleucocytation universelle avant l’entreposage et la transfusion des culots globulaires plus de 14 jours après le don (Uchida et al., 2013; Jawa et al., 2015). Toutefois, une étude scientifique plus récente a conclu qu’après 21 jours d’entreposage hypothermique des culots globulaires, les lymphocytes T étaient suffisamment inactifs, ce qui pourrait aider à prévenir la GvH transfusionnelle lorsque les culots globulaires irradiés ne sont pas disponibles (Mykhailova et al., 2021).

  1. Recommandation : En cas de transfusion urgente, si l’établissement ne fait pas d’irradiation sur place ou ne tient pas en stock des produits irradiés avant l’entreposage, il est recommandé de transfuser aux patients ayant une indication clinique de produits irradiés des culots globulaires d’au moins 14 jours, mais de préférence de plus de 21 jours, qui ont été déleucocytés avant l’entreposage.
  2. Recommandation : En cas d’inquiétudes quant au potentiel immunosuppresseur de nouveaux médicaments et d’incertitude quant au risque de GvH transfusionnelle, si l’établissement ne fait pas d’irradiation sur place ou ne tient pas en stock des produits irradiés avant l’entreposage, il est conseillé de fournir des culots globulaires d’au moins 14 jours, mais de préférence de plus de 21 jours, qui ont été déleucocytés avant l’entreposage.
  3. Recommandation : Les technologies d’inactivation ou de réduction des agents pathogènes peuvent être considérées comme une solution de remplacement ou une stratégie équivalente à l’irradiation pour atténuer les risques de GvH transfusionnelle. Il faut consulter les recommandations des fabricants pour déterminer s’il est nécessaire d’irradier le produit après l’inactivation ou la réduction des agents pathogènes.
Recommandations Cliniques

Pour formuler les recommandations cliniques suivantes, le sous-comité CCN-CCNMT sur l’irradiation s’est principalement inspiré des lignes directrices de la BSH (2020) au Royaume-Uni et de celles du BJH (2021) aux Pays-Bas, qui incluent des données probantes actuelles à l’appui de ces recommandations.

Concernant les états pathologiques énumérés ci-après, le praticien principal qui demande la transfusion sanguine doit prendre en considération les antécédents pharmaceutiques du patient, car le traitement reçu a peut-être nécessité l’utilisation de produits cellulaires irradiés. L’indication d’une transfusion de produits sanguins irradiés est une décision clinique qui exige une communication claire du praticien qui en fait la demande au service de médecine transfusionnelle. Ce service doit s’assurer de la pertinence de l’utilisation de sang irradié et avoir une politique dressant la liste des indications acceptables. S’il identifie une demande non appropriée de transfusion de sang irradié, il est recommandé qu’il dispose d’un mécanisme enclenchant des communications de suivi avec le praticien à l’origine de la demande pour revoir celle-ci.

Il est recommandé que les praticiens revoient régulièrement (par exemple chaque année) l’indication justifiant la transfusion de produits sanguins pour les patients atteints de maladies acquises ou ayant des indications en lien avec leur traitement justifiant la transfusion de sang irradié, car, dans certains cas, il peut être envisagé de supprimer l’indication. Si le praticien principal détermine qu’il convient d’arrêter la transfusion de sang irradié, ce changement doit être clairement communiqué au service de médecine transfusionnelle, conformément aux politiques locales.

L’annexe A offre un guide de référence rapide sur les indications cliniques associées à la transfusion de produits sanguins irradiés.

7. Acute leukemia

Il n’existe aucune preuve concluante confirmant la nécessité de transfuser du sang irradié aux patients adultes ou pédiatriques atteints de leucémie aiguë (quel qu’en soit le type) qui ne présentent aucun facteur de risque de GvH transfusionnelle. Les protocoles de chimiothérapie pour la leucémie aiguë ne comportent généralement pas d’agents pharmacothérapeutiques connus comme facteurs de risque de GvH transfusionnelle. Toutefois, il est recommandé que les praticiens examinent chaque protocole de traitement pour s’assurer qu’il n’y a aucune indication sous-jacente de transfusion de sang irradié (voir le point 16).

  1. Recommandation : Il n’est pas recommandé d’irradier des culots globulaires ou des plaquettes pour les adultes ou les enfants atteints de leucémie aiguë, sauf pour les plaquettes sélectionnées par typage HLA, la transfusion de granulocytes, les dons provenant de parents de premier ou de second degré, ou dans le contexte d’une indication clinique préexistante ou en raison d’un traitement actuel ou passé incluant une indication de produits sanguins irradiés.

8. Allogreffe de cellules souches hématopoïétiques

Les lignes directrices publiées confirment qu’il convient de transfuser des produits sanguins irradiés aux receveurs d’une allogreffe de moelle osseuse à partir du début de la chimiothérapie de conditionnement. Les recommandations du CCN-CCNMT s’alignent sur les lignes directrices de la BSH de 2020. Toutefois, le sous-comité sur l’irradiation a adopté une approche plus stricte : il est impératif que les produits sanguins soient irradiés à partir du conditionnement, et il ne s’agit pas d’une option comme le prévoit la publication de la BSH de 2020.

Toutefois, ces lignes directrices définissent avec moins de certitude le moment où l’on peut cesser la transfusion de produits irradiés après la greffe. Le sous-comité CCN-CCNMT sur l’irradiation convient que les critères d’arrêt suggérés dans la publication de la BSH de 2020 doivent guider la décision clinique. Étant donné la rareté des données probantes en la matière, on conseille que la décision de cesser la transfusion de produits sanguins irradiés soit laissée à la discrétion de l’équipe médicale responsable de la greffe.

  1. Recommandation : Tous les receveurs adultes et pédiatriques d’une allogreffe de cellules souches hématopoïétiques doivent recevoir des produits irradiés à partir du début de la chimioradiothérapie de conditionnement. La recommandation s’applique à tous les cas dans lesquels une greffe de cellules souches hématopoïétiques est indiquée, quel que soit le diagnostic sous-jacent.
  2. Recommandation : Il est recommandé de poursuivre la transfusion de produits sanguins irradiés tout au long de la prophylaxie visant à prévenir la maladie du greffon contre l’hôte.
  3. Recommandation : Il est recommandé de revoir l’indication de transfusion de produits sanguins irradiés au moins une fois par année. Le médecin responsable de la greffe peut envisager de supprimer cette exigence de produits sanguins irradiés si toutes les conditions suivantes sont réunies :
    1. Plus de 6 mois se sont écoulés depuis la date de la greffe;
    2. La numération des lymphocytes est supérieure à 1 x 109/l;
    3. Il n’y a aucune preuve de maladie du greffon contre l’hôte;
    4. Le traitement immunosuppresseur a été complètement mis à l’arrêt.
  4. Recommandation : Il est recommandé de poursuivre la transfusion de produits sanguins irradiés chez les patients ayant besoin d’une injection de lymphocytes du donneur dans le cadre de leur thérapie post-allogreffe. La durée de cette transfusion dépend de facteurs cliniques liés à la prise de greffe, à la présence d’une forme aiguë ou chronique de GvH et à la thérapie immunosuppressive en cours.
  5. Recommandation : En cas de forme aiguë ou chronique de GvH nécessitant un traitement immunosuppressif, ou en cas d’apparition de GvH après la suppression de l’indication d’irradiation et la réintégration du traitement immunosuppresseur, il est recommandé d’administrer les produits sanguins irradiés indéfiniment.
  6. Recommandation : Il est également recommandé d’irradier le sang allogène transfusé à des donneurs de moelle osseuse et de cellules souches de sang périphérique de tous âges dans les 7 jours précédant le prélèvement ou pendant le prélèvement.

9. Anémie aplasique

  1. Recommandation : L’utilisation de produits sanguins irradiés est recommandée pour les patients ayant une anémie aplasique qui reçoivent un traitement par globuline antithymocyte (GAT) ou alemtuzumab.
    (BSH 2020, recommandation de classe 2; niveau de preuve C)*
  2. Recommandation : Étant donné la rareté des données probantes, on ne peut pas fermement recommander la durée pendant laquelle il faudrait continuer à utiliser les produits sanguins irradiés après l’administration de GAT chez les patients atteints d’anémie aplasique.
  3. Recommandation : Les patients atteints d’anémie aplasique qui ont reçu un traitement par alemtuzumab (anti-CD52) doivent recevoir des produits sanguins irradiés pendant au moins 6 mois après l’arrêt du traitement.
  4. Recommandation : En l’absence d’indications justifiant la transfusion de produits irradiés, les patients ayant une anémie aplasique n’ont pas besoin d’une transfusion de globules rouges et de plaquettes irradiés.

Reportez-vous au point 16 pour davantage d’informations sur les indications d’irradiation en lien avec l’utilisation de GAT et d’alemtuzumab dans le contexte de diagnostics hématologiques.

10. Autogreffe de cellules souches hématopoïétiques

  1. Recommandation : Il est recommandé que les patients chez qui on prélève de la moelle osseuse ou des cellules souches de sang périphérique en vue d’une injection autologue reçoivent des produits cellulaires irradiés pendant le prélèvement et pendant les 7 jours qui le précèdent afin de prévenir la collecte de lymphocytes T allogènes viables, qui peuvent résister à la cryoconservation.
    (BSH 2020, recommandation de classe 1; niveau de preuve C)*
  2. Recommandation : Il est recommandé que tous les patients qui subissent une autogreffe de moelle osseuse ou de cellules souches de sang périphérique reçoivent des produits cellulaires irradiés à partir du début de la chimioradiothérapie de conditionnement jusqu’à 3 mois après la greffe (jusqu’à 6 mois au total, en cas d’irradiation corporelle totale pour le conditionnement).
    (BSH 2020, recommandation de classe 1; niveau de preuve C)*

11. Thérapie par lymphocytes T à récepteur antigénique chimérique (CAR-T)

  1. Recommandation : Il est recommandé que les patients chez qui on prélève des lymphocytes de sang périphérique pour une réinjection de cellules CAR-T reçoivent des produits sanguins irradiés pendant 7 jours avant le prélèvement et pendant le prélèvement afin d’éviter le prélèvement de lymphocytes T allogènes viables. Il est recommandé de continuer à utiliser les produits sanguins irradiés jusqu’à 6 mois après l’injection de cellules CAR-T (en raison du conditionnement à base d’analogues puriques), à moins que d’autres pharmacothérapies, maladies ou traitements antérieurs déterminent une durée différente pour la transfusion de sang irradié.

12. États d’immunodéficience acquis

  1. Recommandation : Il n’y a aucune indication d’irradiation des produits sanguins cellulaires pour les nourrissons ou les enfants qui souffrent d’un dysfonctionnement temporaire des lymphocytes T à cause d’une infection virale. Aucune indication ne justifie non plus l’irradiation systématique de produits sanguins cellulaires pour les adultes ou les enfants qui sont séropositifs au VIH ou qui ont le syndrome d’immunodéficience acquise (SIDA).
    (BSH 2020, recommandation de classe 1; niveau de preuve B)*

13. États d’immunodéficience congénitaux

  1. Recommandation : Il est conseillé de considérer tous les cas graves de syndrome d’immunodéficience des lymphocytes T présentant une anomalie qualitative ou quantitative significative des lymphocytes T comme une indication justifiant l’irradiation des produits sanguins cellulaires.
    (BSH 2020, recommandation de classe 1; niveau de preuve B)*
  2. Recommendation: En cas de suspicion d’une forme grave d’immunodéficience des lymphocytes T, il est recommandé d’administrer des produits sanguins irradiés pendant que l’on entreprend des tests plus poussés pour établir le diagnostic. En cas d’incertitude, il y a lieu de consulter un immunologue clinicien.
    (BSH 2020, recommandation de classe 1; niveau de preuve C)*
  3. Recommandation : Dans la mesure du possible, pour les nouveau-nés et les nourrissons chez lesquels on suspecte un syndrome d’immunodéficience, il est recommandé de les soumettre à une enquête d’immunodéficience des lymphocytes T avant la chirurgie cardiaque. Si les résultats ne sont pas disponibles avant la chirurgie, il est recommandé d’administrer des produits cellulaires irradiés jusqu’à la fin de l’enquête immunologique.
  4. Recommandation : Les adultes et les enfants âgés de plus de 2 ans sans antécédents importants d’infection qui sont orientés vers une chirurgie cardiaque non urgente pour des problèmes associés au syndrome DiGeorge (anomalies des arcs aortiques, sténose de l’artère pulmonaire) ou chez qui on suspecte une anomalie DiGeorge n’ont pas besoin de produits cellulaires irradiés, à moins qu’ils aient d’importants antécédents d’immunodéficience grave des lymphocytes T, étant donné que le risque de GvH transfusionnelle est extrêmement faible.
    (BSH 2020, recommandation de classe 2; niveau de preuve C)*
  5. Recommandation : Dans les centres qui offrent le dépistage des cas graves d’immunodéficience des lymphocytes T chez les nouveau-nés, il est recommandé de mettre en place un mécanisme de communication des résultats des tests de dépistage et de confirmation au service de médecine transfusionnelle afin de garantir une utilisation appropriée des produits sanguins irradiés chez les nourrissons.

14. Lymphome

La documentation disponible laisse penser que le risque de GvH transfusionnelle chez les personnes ayant un lymphome hodgkinien est plus élevé que chez celles ayant un lymphome non hodgkinien. Le risque ne semble pas lié au stade de la maladie ni à la modalité de traitement, des cas de GvH transfusionnelle tardive ayant été signalés chez ces patients (Spitzer et al., 1990). Bien que les dernières données d’hémovigilance laissent penser qu’il y a eu une incidence extrêmement faible de GvH transfusionnelle ou non transfusionnelle dans certains systèmes d’hémovigilance malgré l’administration de produits non irradiés par erreur, les lignes directrices de la BSH de 2020 et celles du BJH de 2021 aux Pays-Bas ne s’entendent pas sur leurs recommandations (Bolton-Maggs, 2021).

L’avis des experts varie et il manque de données probantes justifiant une indication d’irradiation indéfinie en cas de lymphome hodgkinien.

  1. Recommandation : Tous les adultes et les enfants ayant un lymphome hodgkinien, quel que soit le stade de la maladie, doivent recevoir des culots globulaires et des plaquettes irradiés à partir du diagnostic, et ce, pendant au moins 6 mois après la rémission.

En raison de la rareté des données probantes, la décision de cesser la transfusion de produits sanguins irradiés dans ce contexte reste à la discrétion du médecin traitant.

Le seul diagnostic de lymphome non hodgkinien n’est pas une indication justifiant la transfusion de produits sanguins irradiés. Toutefois, l’utilisation de certaines thérapies peut nécessiter l’utilisation de la transfusion de produits sanguins irradiés. (Voir le point 16 ci-dessous pour plus de détails).

15. Transfusions néonatales

En 2016, le CCN a mené une enquête pour mieux comprendre les pratiques canadiennes actuelles concernant l’utilisation des produits sanguins irradiés chez les populations néonatales spécifiquement. Cette enquête a servi à guider les premières recommandations en lien avec les transfusions néonatales de produits irradiés. Ensuite, la publication des lignes directrices de la BSH en 2020 et du BJH en 2021 ainsi que la documentation connexe ont servi de ressources sentinelles pour la révision des recommandations de ce point.

Voici les recommandations du sous-comité CCN-CCNMT sur l’irradiation pour les transfusions néonatales :

Transfusions intra-utérines :

  1. Recommandation : Tous les produits sanguins utilisés pour les transfusions intra-utérines doivent être irradiés. Pour réduire au minimum l’effet de la charge de potassium, les culots globulaires doivent être le plus frais possible et doivent être transfusés dans les 24 heures suivant l’irradiation.
  2. Recommandation : Les produits cellulaires irradiés sont recommandés pour les nouveau-nés qui ont reçu une transfusion intra-utérine. Dans ce cas, il est recommandé d’administrer les produits irradiés jusqu’à 6 mois après la date d’accouchement prévue (40 semaines de gestation).

Exsanguino-transfusions néonatales :

  1. Recommandation : Il est essentiel d’irradier le sang utilisé pour les exsanguino-transfusions néonatales si une transfusion intra-utérine a eu lieu ou si le don provient d’un parent au premier ou deuxième degré.
  2. Recommandation : Pour les autres cas d’exsanguino-transfusion néonatale, l’irradiation est recommandée pourvu que cela ne retarde pas indûment la transfusion.
  3. Recommandation : Il est recommandé que les culots globulaires utilisés pour les exsanguino-transfusions néonatales soient aussi frais que possible. Ils doivent être transfusés dans les 24 heures suivant l’irradiation.

Si le sang maternel est le seul compatible pour un nouveau-né, il DOIT ABSOLUMENT être irradié car il s’agit alors d’un don de sang dirigé haplo-identique (voir le point 1, recommandation B).

Transfusions d’entretien néonatales (petit volume) :

Pour les transfusions de petit volume chez les nouveau-nés, le sous-comité CCN-CCNMT sur l’irradiation reconnaît qu’il n’y a pas suffisamment de données pour donner une orientation ferme à la pratique transfusionnelle. Les lignes directrices de la BSH de 2020 au Royaume-Uni et celles du BJH de 2021 aux Pays-Bas ne recommandent pas la transfusion de culots globulaires irradiés pour les transfusions de petit volume chez les nourrissons qui ont un très petit poids à la naissance, ce poids étant défini par l’Organisation mondiale de la santé à moins de 1 500 grammes. Le sous-comité est d’accord avec cette recommandation. Depuis 1996 (déleucocytation universelle), le Royaume-Uni n’a pas irradié de culots globulaires pour les transfusions de petit volume chez les nourrissons ayant un très petit poids à la naissance, à l’exception des transfusions intra-utérines et des immunodéficiences congénitales présentant une forte anomalie quantitative ou qualitative des lymphocytes T; et aucun cas de GvH transfusionnelle associé n’a été signalé par leur robuste système d’hémovigilance (SHOT, Royaume-Uni). Par ailleurs, il y a eu des cas historiques de GvH transfusionnelle chez les nouveau-nés dans la période précédant la réduction en leucocytes.

Le sous-comité CCN-CCNMT sur l’irradiation reconnaît que cette recommandation est un changement de paradigme et que certains établissements peuvent décider de continuer à utiliser des produits sanguins irradiés pour des transfusions d’entretien néonatales chez les nourrissons ayant un très petit poids à la naissance.

  1. Recommandation : En général, les bébés prématurés, définis comme pesant moins de 1 500 grammes à la naissance et/ou naissant à moins de 32 semaines, n’ont pas besoin de culots globulaires ou de plaquettes irradiés, sans dans les cas d’immunodéficience congénitale et après une transfusion intra-utérine.
  2. Recommandation : Si le patient est particulièrement à risque d’hyperkaliémie, il est recommandé de transfuser les culots globulaires dans les 24 heures suivant leur irradiation. Les culots globulaires qui ont été irradiés depuis plus de 24 heures doivent à tout le moins être centrifugés et le plasma surnageant être retiré.

Idéalement, il faudrait que les établissements ayant des unités de soins intensifs néonatals de niveau 3 aient un irradiateur sur place pour faciliter l’irradiation d’aliquotes de culots globulaires juste avant leur utilisation.

Pour les hôpitaux qui n’ont pas d’irradiateur, il peut être nécessaire que le fournisseur ou un centre hospitalier régional conserve une petite réserve de culots globulaires irradiés. Dans ce contexte, il est recommandé de considérer le partage d’une unité entre deux nouveau-nés ou plus comme un mécanisme d’utilisation optimale d’une unité de culot globulaire fraîchement irradiée et un moyen de réduire le temps d’entreposage post-irradiation. Pour un nouveau-né qui a besoin de transfusions répétées, cette pratique peut augmenter l’exposition aux donneurs, mais elle devrait faciliter la rotation régulière (par exemple hebdomadaire) d’une unité de globules rouges irradiée avant l’entreposage, et contribuer ainsi à réduire les risques associés à la qualité du produit.

Dans tous les cas de transfusion néonatale de petit volume, les aliquotes doivent avoir été irradiées depuis moins de 14 jours et ne doivent pas être âgées de plus de 28 jours à compter du don (normes actuelles Z902-20 de la CSA). Les aliquotes irradiées depuis plus de 24 heures doivent à tout le moins avoir été centrifugées pour réduire le plasma surnageant. Selon une étude récente, la réduction du surnageant par centrifugation est préférable à la sédimentation par gravité (Serrano et al., 2017). Il est recommandé que l’hématocrite final ne dépasse pas 0,80 l/l (normes Z902-20 de la CSA, 2020). Il est recommandé d’effectuer toute manipulation au moment le plus rapproché possible de l’utilisation du culot globulaire pour la transfusion.

Transfusions d’urgence :

  1. Recommandation : Lorsqu’il faut transfuser d’urgence des globules rouges du groupe O sans épreuve de compatibilité pour réanimer un nouveau-né en cas de complication ou d’accident obstétrique, il n’est pas nécessaire que les produits cellulaires soient irradiés.

Anomalie cardiaque congénitale :

La présence d’une anomalie cardiaque congénitale chez un nouveau-né ou un nourrisson peut faire suspecter un syndrome de délétion du chromosome 22q11, communément associé à une immunodéficience congénital des lymphocytes T. Parmi les anomalies cardiaques le plus fréquemment associées aux délétions du chromosome 22q11 figurent la tétralogie de Fallot, la communication interventriculaire, l’interruption de l’arc aortique, l’atrésie pulmonaire combinée à une communication interventriculaire et le tronc artériel commun (Ryan et al., 1997).

  1. Recommandation : Il n’est pas nécessaire d’irradier les globules rouges ou les plaquettes pour les nourrissons qui subissent une chirurgie cardiaque, sauf si les caractéristiques cliniques ou biologiques indiquent la présence d’un syndrome d’immunodéficience des lymphocytes T coexistant.
  2. Recommandation : Il est recommandé que tous les nouveau-nés ayant une anomalie cardiaque complexe reçoivent des produits cellulaires irradiés jusqu’à ce que l’on ait exclu un trouble d’immunodéficience congénitale des lymphocytes T. Si un trouble d’immunodéficience congénitale est confirmé, il est recommandé d’administrer à vie les produits cellulaires irradiés (voir le point 13. États d’immunodéficience congénitaux).

16. Agents pharmacothérapeutiques : analogues puriques et autres thérapies immunosuppressives puissantes ciblant les cellules T pour des indications hématologiques

Les traitements au moyen d’analogues puriques et de thérapies similaires produisent une lymphopénie grave et durable. Des cas de GvH transfusionnelle ont été signalés après un traitement utilisant les analogues puriques fludarabine et cladribine. Aucun cas de GvH transfusionnelle liée aux analogues puriques n’a été signalé dans les données d’hémovigilance du programme SHOT au Royaume-Uni depuis l’introduction de la déleucocytation universelle. Les lignes directrices de la BSH mises à jour en 2020 au Royaume-Uni continuent de recommander l’administration indéfinie de produits sanguins irradiés aux patients traités avec des analogues puriques. Toutefois, les lignes directrices du BJH de 2021 aux Pays-Bas indiquent qu’il est recommandé d’administrer des produits irradiés pendant au moins 6 mois après l’arrêt du traitement par analogues puriques avant de penser à supprimer l’indication d’irradiation.

Le risque de GvH transfusionnelle n’a pas été confirmé avec les analogues puriques, mais l’administration de produits irradiés est fréquente, car leur mode d’action est similaire à celui des analogues puriques.

Le sous-comité CCN-CCNMT sur l’irradiation reconnaît qu’il existe peu de données pour orienter une ferme recommandation de donner du sang irradié aux patients traités avec des analogues puriques ou apparentés. Nous reconnaissons qu’il peut être envisagé de supprimer l’indication de transfusion de produits cellulaires irradiés 6 mois après l’arrêt de ces traitements.

Il est recommandé que la décision de transfuser du sang irradié à des patients qui prennent certains médicaments immunosuppresseurs soit prise en consultation avec le professionnel de la santé principal et tienne compte des avantages et des risques perçus d’une transfusion de sang irradié et de la disponibilité du produit. En cas d’incertitude ou d’inquiétude quant au pouvoir immunosuppresseur d’un médicament en particulier, notamment dans le contexte de thérapies décrites comme entravant directement le fonctionnement des lymphocytes T en cas de traitement pour une hémopathie maligne, il est recommandé d’en discuter avec un spécialiste de la médecine transfusionnelle.

  1. Recommandation : Tous les patients traités avec des analogues puriques (fludarabine, cladribine, désoxycoformicine [pentostatin] et nélarabine) doivent recevoir des produits sanguins irradiés pendant au moins 6 mois après l’arrêt du traitement.
  2. Recommandation : Le risque avec les autres antipuriques, les nouveaux agents ou les produits apparentés comme la bendamustine et la clofarabine n’est pas clair. Étant donné que ces agents ont un mode d’action similaire aux analogues puriques, il est recommandé que les patients reçoivent des produits irradiés pendant au moins 6 mois après l’arrêt du traitement.

L’utilisation de produits sanguins irradiés n’est pas requise pour les patients traités avec les analogues puriques 6-mercaptopurine (6-MP) et azathioprine. Ces médicaments ne sont pas réputés avoir le même pouvoir immunosuppresseur que les agents chimiothérapeutiques énumérés précédemment et, d’après la documentation disponible, ils n’ont pas été associés à un risque accru de GvH transfusionnelle.

Les puissantes thérapies par anticorps ciblant les lymphocytes T utilisées comme agents immunosuppresseurs dans le contexte d’hémopathies malignes ont été associées à un risque accru de GvH transfusionnelle. Toutefois, les recommandations concernant la transfusion de produits sanguins irradiés dans le contexte de leur utilisation pour d’autres maladies varient (voir le point 17 ci-dessous pour plus de détails).

  1. Recommandation : Les patients atteints d’anémie aplasique ou d’une hémopathie maligne qui ont reçu un traitement par alemtuzumab (anti-CD52) doivent recevoir des produits sanguins irradiés pendant au moins 6 mois après l’arrêt du traitement.

La globuline antithymocyte (GAT), qui est tirée des chevaux ou des lapins, est un agent immunosuppresseur puissant utilisé dans plusieurs applications cliniques. Les spécialistes s’entendent pour dire qu’il est recommandé que les patients traités par GAT en raison d’une anémie aplasique grave reçoivent des produits sanguins irradiés (voir le point 9 ci-dessus).

  1. Recommandation : Il est recommandé que les patients traités par GAT dans le contexte d’une anémie aplasique ou d’une hémopathie maligne reçoivent des produits sanguins irradiés.
  2. Recommandation : Étant donné la rareté des données probantes, on ne peut pas fermement recommander la durée pendant laquelle il conviendrait de continuer à utiliser les produits sanguins irradiés après l’administration de GAT chez les patients atteints d’anémie aplasique.

Rien ne prouve que le risque accru de GvH transfusionnelle soit plus élevé chez les receveurs d’organes solides conditionnés à la GAT. Par conséquent, les lignes directrices actuelles concernant la transplantation d’organes solides ne mentionnent pas de besoin précis concernant la transfusion de sang irradié pour cette population (groupe de travail sur la transplantation de KDIGO, 2009; voir le point 17 ci-dessous). Le risque de GvH transfusionnelle est inconnu pour les patients qui font l’objet d’un conditionnement à intensité réduite avec la GAT seule en vue d’une allogreffe de cellules souches hématopoïétiques.

Il est difficile d’émettre une recommandation claire, favorable ou non, quant à l’utilisation de sang irradié dans le contexte de toutes les thérapies immunosuppressives et biologiques existantes, car il n’existe aucune étude publiée sur des agents particuliers utilisés dans des contextes cliniques donnés. C’est notamment le cas pour les nouveaux agents pharmacothérapeutiques.

  1. Recommandation : Lorsque les recommandations cliniques publiées ne fournissent aucune autre ligne directrice, il est recommandé que le médecin prescripteur consulte la monographie des nouveaux agents thérapeutiques immunosuppresseurs pour guider l’utilisation de la transfusion de produits sanguins irradiés.

Les thérapies ciblant les lymphocytes B dans le contexte d’hémopathies malignes (comme le rituximab) n’exigent pas de transfusion de produits sanguins irradiés.

17. Tumeurs solides, transplantation d’organes solides, affections auto-immunes, immunodéficience acquise

  1. Recommandation : L’irradiation des produits sanguins n’est pas nécessaire pour les patients qui ont une tumeur solide, à moins que l’utilisation des produits sanguins irradiés soit indiquée pour une autre raison (diagnostic sous-jacent, type de produit, traitement antérieur).
  2. Recommandation : L’utilisation de produits cellulaires irradiés n’est pas indiquée après une traitement par alemtuzumab suivant le calendrier actuellement recommandé pour la sclérose en plaques ou la vascularite.
    (BSH 2020, recommandation de classe 1; niveau de preuve B)*
  3. Recommandation : L’utilisation de produits cellulaires irradiés n’est pas indiquée pour les patients qui viennent de subir une transplantation d’organe solide et qui ont reçu un traitement d’induction par alemtuzumab ou GAT, ou en cas de traitement du rejet de greffe.
    (BSH 2020, recommandation de classe 1; niveau de preuve B)*
  4. Recommandation : Le traitement des patients au rituximab n’est pas une indication justifiant l’utilisation de produits cellulaires irradiés, à moins qu’elle le soit pour une autre raison (diagnostic sous-jacent, type de produit, traitement antérieur).
    (BSH 2020, recommandation de classe 1; niveau de preuve B)*

18. Chirurgies courantes et récupération péropératoire

Les méthodes de récupération peropératoire des globules rouges autologues sont importantes pour réduire le taux de transfusion de sang allogène et les risques associés durant une opération majeure. Pour les patients souffrant d’un cancer, la récupération peropératoire est controversée à cause du risque théorique de propagation de métastases que pose la réinjection de sang autologue contaminé par des cellules métastatiques. Toutefois, une méta-analyse récente de 10 études a montré qu’il n’y a aucune différence significative dans les taux de récidive du cancer entre les patients ayant bénéficié d’une récupération peropératoire et ceux ne l’ayant pas eue (Waters et al., 2012). Une revue systématique des cas de récupération peropératoire faite dans le cadre de l’ablation chirurgicale de tumeurs vertébrales métastatiques (Kumar et al., 2014) n’a pas révélé non plus de risque accru de dissémination tumorale ou de métastases chez ces patients. Il y avait toutefois une mise en garde dans les cas de rupture tumorale.

L’utilisation de l’irradiation aux rayons gamma ou le recours à un filtre de réduction leucocytaire en microfibre à petits pores (40 um ou moins) ont été établies comme des stratégies efficaces pour réduire le risque de transmission de cellules métastatiques associé à la récupération peropératoire chez les patients opérés pour une tumeur maligne (Trudeau et al., 2012). Dans les hôpitaux, les filtres de réduction leucocytaire sont plus facilement accessibles que les irradiateurs et ne causent pas de dommages à la membrane des globules rouges. On les utilise donc beaucoup plus couramment. Les risques et les avantages de la récupération peropératoire dans le contexte d’une intervention chirurgicale sur des patients ayant une tumeur maligne suspectée ou connue doivent être pesés par l’équipe de soins périopératoires et faire l’objet d’une discussion avec le patient avant l’intervention.

  1. Recommandation : Dans le cas des patients qui se font opérer pour une tumeur maligne, il n’est pas nécessaire d’irradier le sang autologue recueilli par récupération peropératoire si on utilise un filtre de réduction leucocytaire en microfibre à petits pores (40 um ou moins) avant la réinjection.
  2. Recommandation : L’irradiation des produits sanguins n’est pas nécessaire pour les patients qui subissent une chirurgie courante, à moins que l’utilisation des produits sanguins irradiés soit indiquée pour une autre raison (diagnostic sous-jacent, type de produit, traitement antérieur).

References

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Appendices

Annexe A

Guide de référence rapide Indications cliniques pour la transfusion de produits sanguins irradiés

2023-10-27 Irradiation Recommendations - Appendix A_FR.png
2023-10-27 Irradiation Recommendations - Appendix A_FR.png
Annexe B
2023-10-27 Irradiation Recommendations - Appendix B_FR.png
2023-10-27 Irradiation Recommendations - Appendix B_FR.png